« Ma tante » est un formidable baromètre économique et social, le meilleur même
Elle connaît en ces temps de crise une activité en constante augmentation avec, entre 2011 et 2015, une envolée des dépôts de 59% en valeur et 28% en nombre.
Rien qu’entre le mois d’août 2014 et septembre 2014 les dépôts ont augmenté de 34% en valeur et de 18% en nombre, annonce-t-elle.
Mais, au fait, de qui parlons-nous ? « Ma tante »…ce mont de piété d’origine italienne !
Un mont de piété est un organisme de prêt sur gage, d’inspiration catholique, ne pratiquant pas l’usure.
L’idée du mont-de-piété est née en 1462, quand un moine italien, Barnabé de Terni, cherche un moyen de combattre l’usure et les taux d’intérêt abusifs (jusqu’à 300 %) pratiqués à l’époque par les divers prêteurs sur gage protestant et/ou juifs. Il convainc les riches de la cité de Pérouse de constituer un fonds permettant de créer un établissement de prêts sur gages : le Monte di Pietà, avec comme emblème inchangé à ce jour, le « grype », créature légendaire qui gardait les mines d’or d’Apollon dans le désert scythe. Tout un symbole…
Plusieurs frères mineurs prêchent à sa suite la création des monts-de-piété. Dix ans plus tard, le Monte dei Paschi di Siena (la Monte Paschi, fameuse banque historique italienne) est établi à Sienne avec le même objectif.
Cet établissement propose alors un système de prêt sur gage à faible intérêt ou gratuit (n’y allez plus dans le même objectif, son ambition initiale à bien changé !).
L’ensemble de l’Italie se voit irriguée par des initiatives semblables. Au Ve Concile de Latran, en 1515, le pape Léon X reconnaît officiellement les monts-de-piété et leur vocation sociale.
Le terme français vient de la « mauvaise traduction en français de l’italien monte di pietà, “crédit de pitié” », de monte, « valeur, montant », et pietà, « pitié, charité ». »
« Ma tante » française
C’est à Paris que le fondateur de « La Gazette de France », Théophraste Renaudot, ouvre le 27 mars 1637 (et ce malgré une première tentative en 1610 dans la ville papale d’Avignon par la congrégation de Notre-Dame de Lorette) le premier mont-de-piété. Cinq ans plus tard, le roi Louis XIII autorise 58 autres villes du royaume à établir des monts-de-piété.
Dépassant le simple cadre des indigents, ne se limitant plus au seul cadre de la misère, au XIXe siècle, le propre fils de Louis-Philippe, le prince de Joinville François-Ferdinand d’Orléans, aurait ainsi déposé sa montre pour honorer une dette de jeu.
Quelque peu honteux, il avait prétendu l’avoir oubliée chez sa tante. D’où la fameuse expression « ma tante » pour qualifier le mont-de-piété.
Cet évènement a ouvert les portes de l’institution à l’ensemble du corps social. Toutes les classes sociales ont eu recours au prêt sur gage, du Paris populaire en passant par Joséphine de Beaumarchais.
C’est lui…le crédit municipal
C’est un décret du 24 octobre 1918 qui transformera les monts-de-piété en caisses de crédit municipal. Le mont-de-piété de Paris devient ainsi le Crédit municipal de Paris.
Le changement de dénomination correspond au développement de ses activités bancaires parallèlement aux prêts sur gages. Tout y passe, du matelas en passant par la montre de famille, finissant par le tableau poussiéreux…
La crise n’épargne aucun bien !
Un mode de fonctionnement qui fait son succès…
Contre le dépôt d’un objet de « valeur » un prêt vous est accordé immédiatement. C’est la valeur estimée de l’objet sur le marché des enchères publiques qui détermine le montant du prêt. Le prêt est généralement accordé dans un délai d’environ une heure selon l’affluence du jour et de l’heure.
Vos objets sont estimés sur place par des commissaires-priseurs. C’est la valeur de votre objet qui détermine le montant de votre prêt. Celui-ci représente 50 à 70 % de la valeur estimée de votre objet sur le marché des ventes aux enchères publiques. Une belle manne suivant l’objet dégoté…
Mais la fonction de ses crédits municipaux s’est bien élargie. A la fois, banque municipale, hôtel des ventes, voir même musée, le mont de piété est devenu pour beaucoup le partenaire incontournable de la crise financière actuelle !
Alors selon vous, peut-on parler de finance éthique, sociale ou de miroir aux alouettes ? Plus simplement, y avez-vous déjà fait appel ? Je vous laisse découvrir cette institution historique et en débattre…